A l'instar des luttes pouvant exister entre associés d'une même société, des conflits peuvent émerger entre copropriétaires, et il n'est pas rare de voir des projets contrariés - sans motif autre que l'animosité - au détriment d'un copropriétaire ou pire, au détriment des intérêts collectifs de la copropriété.

Or si la liberté de voter apparaît fondamentale et inhérente à tout système de vote majoritaire, tout exercice abusif doit pouvoir être sanctionné.

C'est ainsi que face à la multiplication des litiges entre copropriétaires, les juges, tant français que monégasques, ont étendu la notion d'abus de majorité, bien connue du droit des sociétés, au droit de la copropriété.

Classiquement, un abus de majorité sera caractérisé – et partant sanctionné - lorsqu'il dénotera, sans aucun motif valable, un but autre que l'intérêt collectif et plus précisément :

  • une intention de nuire ou de porter préjudice à l'intérêt d'un copropriétaire,
  • ou des manSuvres frauduleuses,
  • ou la recherche d'un but illégitime contraire aux intérêts de la copropriété.

L'intérêt contraire à l'intérêt collectif peut recouvrir différentes réalités et être défini comme l'intérêt personnel, l'intérêt d'un groupe majoritaire au détriment d'un groupe minoritaire, ou encore la rupture de l'équilibre entre les copropriétaires.

Naturellement, l'abus de majorité se distingue de la simple opposition d'intérêts, qui relève de tout système de vote majoritaire : ainsi, les tribunaux n'ont pas à se prononcer sur l'opportunité de la décision incriminée.

Aussi, le copropriétaire qui invoque l'abus de majorité doit-il en rapporter la preuve ; et si l'assemblée générale n'a pas à motiver sa décision, le syndicat des copropriétaires doit pouvoir justifier a posteriori de motifs sérieux et légitimes, ayant conduit à sa prise de décision.

Si chaque situation factuelle relève naturellement de l'appréciation souveraine des juges du fond, les pratiques suivantes pourraient être sanctionnées, sans que cette liste ne soit limitative :

  • Refus d'autoriser un copropriétaire à réaliser des travaux, alors même que la réalisation de travaux similaires avait été accordée dans le passé à d'autres copropriétaires,
  • Refus d'autoriser des travaux de transformation pourtant conformes à la destination des lots et à la destination de l'immeuble,
  • Autorisation de construire sur des parties communes au seul bénéfice d'un seul copropriétaire, entraînant un accroissement de ses parties privatives et l'octroi d'un droit de jouissance exclusif sur des parties communes,
  • Aliénation de parties communes au profit d'un copropriétaire assorti d'une contrepartie financière dérisoire et manifestement contraire à l'intérêt commun, dénotant une rupture de l'égalité de traitement des copropriétaires,
  • Attribution d'un droit de jouissance privatif sur une partie commune entraînant une rupture d'égalité.

Face à une situation procédant d'un abus, l'annulation de la délibération litigieuse peut être poursuivie, dans un délai imparti de deux mois en Principauté de Monaco, à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée générale qui sera faite à la diligence du Syndic.

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