I. ProcÉdure pÉnale

TF 6B_1194/2022

Rappel de jurisprudence – désignation générique du prévenu dans l'ordonnance pénale [p. 2]

TF 6B_1326/2021 et 6B_1327/2021

Rappel de jurisprudence – désignation générique du prévenu dans l'ordonnance pénale (2) [p. 2]

TF 7B_277/2023

Fiction de la notification – nécessité d'un avertissement ou d'une annonce [p. 4]

TF 6B_657/2022

Renonciation à faire opposition à une ordonnance pénale [p. 5]

II Droit pÉnal Économique

III. Droit international privÉ

IV. Droit de la poursuite et de la faillite

TF 5A_34/2023

Estimation de biens immobiliers lors d'une procédure d'exécution forcée [p. 6]

V. entraide internationale

Quelques propos introductifs

La présente Newsletter de Monfrini Bitton Klein vise à offrir, de manière hebdomadaire, un tour d'horizon de la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral dans les principaux domaines d'activité de l'Etude, soit le droit pénal économique et le recouvrement d'actifs (asset recovery).

Sans prétendre à l'exhaustivité, seront reproduits ci-après les considérants consacrant le raisonnement juridique
principal développé par notre Haute juridiction sur les thématiques suivantes : droit de procédure pénale, droit pénal économique, droit international privé, droit de la poursuite et de la faillite, ainsi que le droit de l'entraide
internationale.

I. PROCÉDURE PÉNALE

TF 6B_1194/2022 du 23 août 2023 | Rappel de jurisprudence – désignation générique du prévenu dans l'ordonnance pénale

  • Par ordonnance pénale du 31 mars 2021, remise au prévenu en mains propres le même jour, le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (« MP») a déclaré « B. », coupable de violation de domicile, d'empêchement d'accomplir un acte officiel et d'insoumission à une décision de l'autorité. Le 12 novembre 2021, le MP a informé le Tribunal de police que le prévenu avait été identifié en la personne de A., en précisant qu'il estimait que cela ne changeait rien au caractère exécutoire de l'ordonnance du 31 mars 2021. Par arrêt du 23 septembre 2022, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a constaté que cette ordonnance pénale était nulle. Le MP a recouru.
  • Le Tribunal fédéral a rappelé dans cet arrêt que les exigences relatives au contenu d'une ordonnance pénale, s'agissant de la désignation de la personne prévenue. Lorsque les données personnelles de la personne prévenue demeurent en tout ou en partie inconnues, il incombe à l'autorité de pallier ces éventuelles carences par toutes mesures utiles permettant de garantir une identification et une désignation claire de celle-ci, propre à prévenir tout risque de confusion. Ainsi, rien n'exclut une désignation générique accompagnée de données signalétiques, pour autant que l'on puisse être certain que la personne qui fait l'objet de la procédure est bien celle que désigne l'ordonnance pénale, à l'exclusion de toute autre. Sous ces conditions, la désignation peut être qualifiée de suffisante, malgré l'absence de données nominatives complètes (consid. 2).
  • Partant, le recours a été admis.

TF 6B_1326/2021 et 6B_1327/2021 du 23 août 2023 | Rappel de jurisprudence – désignation générique du prévenu dans l'ordonnance pénale (2)


  • Dans la même cause que la précédente, l'avocat A., représentant « B. » a aussi recouru au Tribunal fédéral.
  • Par acte du 12 avril 2021, l'avocat A., déclarant agir pour « B. », a formé opposition à l'ordonnance du 31 mars 2021. Le Ministère public (« MP») a indiqué qu'il considérerait l'opposition et la procuration comme viciées dès lors qu'elles ne permettaient pas l'identification du prévenu et lui a imparti un délai pour réparer le vice. En réponse, l'avocat A. a déposé une procuration munie de quatre empreintes digitales et d'une signature illisible, une photographie d'une personne tenant en ses mains cette procuration et une vidéo gravée sur CD-Rom. Le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a retenu que l'opposition ne contenait que la signature de Me A. et ne répondait pas aux exigences déduites de la forme écrite, respectivement de la procuration écrite, découlant des art.110 et 129 CPP, nonobstant un délai pour corriger le vice imparti en application de l'art. 110 al. 4 CPP. Il a enfin été relevé que « B. » avait été formellement avisé par le MP, lors de son audition du 31 mars 2021, que sa décision de ne pas donner son identité le priverait des voies de droit ouvertes par la loi pour contester l'ordonnance pénale, de sorte qu'en refusant de décliner son identité, il avait renoncé à son droit d'accès aux tribunaux, dès lors qu'il n'était pas envisageable d'admettre une personne dont on ne connaîtrait pas l'identité dans l'enceinte d'un tribunal et encore moins en salle d'audience. Pour ces motifs en particulier, le Tribunal de police a déclaré l'opposition irrecevable et l'ordonnance pénale exécutoire.
  • Sous forme écrite, la procuration doit indiquer le nom du client, celui de l'avocat mandaté par ce dernier et comporter la signature du client, respectivement remplir les conditions des art. 13 à 15 CO (consid. 4.1).
  • In casu, il a été constaté que la procuration censée établir les pouvoirs de l'avocat A. ne comportait pas le nom de son client, mais uniquement une désignation calquée sur celle de l'ordonnance pénale du 31 mars 2021, soit « B. ». Force est donc de constater que la procuration en question n'était pas formellement conforme aux éléments rappelés plus haut.
  • Il a été fait grief à la cour cantonale d'avoir violé les art. 6 CEDH, 29 et 29a Cst. et 354 CPP, respectivement 396 CPP. Les Recourants font valoir que l'arrêt attaqué, en ce qu'il déclarait irrecevable le recours cantonal contre un prononcé déclarant lui-même irrecevable une opposition à une ordonnance pénale, consacrait une violation du droit d'accès au juge et de la prohibition du formalisme excessif (consid. 7).
  • Le Tribunal fédéral a indiqué avoir déjà jugé que, dans des circonstances parfaitement analogues au cas d'espèce et présentant les mêmes singularités, l'admission de la validité d'une ordonnance pénale désignant la personne prévenue de façon générique, puis la déclaration d'irrecevabilité concernant son opposition à l'ordonnance pénale la condamnant, ainsi que celle de son recours, fondées sur une stricte application des exigences de forme applicables aux voies de droit, respectivement à la procuration censée établir les pouvoirs du mandataire, aboutissaient à une violation de la prohibition du formalisme excessif et de la garantie d'accès au juge (consid. 7.1).
  • In casu, si l'on admettait que la désignation en cause du Recourant, à savoir « B. », était valable sous l'angle de l'art. 353 al. 1 let. b CPP en ce qui concernait l'ordonnance pénale, une telle solution commandait ici aussi d'appréhender en conséquence les exigences formelles concernant les procurations produites en instance cantonale. Comme souligné dans l'arrêt rendu le 27 septembre 2022 par la cour de céans (ATF 149 IV 9), on ne peut guère admettre, d'un côté, une interprétation large des exigences découlant de la disposition précitée, tout en imposant, de l'autre, une stricte application des exigences de forme applicables aux voies de droit permettant de contester la décision de base (cf. art. 354 al. 1 et 396 CPP cum 110 al. 3 et 129 al. 2 CPP). Dans le cas d'espèce, il s'avérait aussi problématique de vouloir à la fois considérer que la désignation retenue pour l'ordonnance pénale renvoyait à une personne identifiable, y compris dans une optique d'exécution de la peine, et ne comportait aucun risque de confusion - et qu'elle était ainsi valable - tout en opposant à cette même personne ainsi désignée des vices de forme lorsqu'elle procède en reprenant la désignation retenue par les autorités. La situation qui en découle est d'autant plus problématique au regard de la nature de l'ordonnance pénale - en tant que proposition de jugement - et de l'importance que revêt la procédure de l'opposition par rapport à la garantie d'accès au juge dans ce contexte. Qui plus est, l'acuité de cette problématique s'en trouve accrue par la peine ferme concrètement en jeu (consid. 7.2).
  • Par conséquent, dans la configuration qui singularisait le cas d'espèce, la conception retenue par la cour cantonale, et avant elle par le premier juge, rompait le rapport raisonnable qui doit subsister entre les exigences de forme et le droit d'accès au juge, et ce quand bien même « B. » était à l'origine des difficultés procédurales auxquelles il a été confronté en raison de son refus de décliner son identité. Son attitude aurait été susceptible d'avoir un effet sur les frais de la cause mais ne saurait, in fine, le priver de tout accès au juge. L'équité de la procédure en a été, quoi qu'il en soit, affectée. Il fallait dès lors admettre que les griefs tirés d'une violation de la prohibition du formalisme excessif et de la garantie d'accès au juge étaient fondés (consid. 7.2).
  • Partant le recours a été partiellement admis.


TF 7B_277/2023 du 19 septembre 2023 | Fiction de la notification – nécessité d'un avertissement ou d'une annonce (art. 85 al. 4 let. a CPP)

  • Selon l'art. 85 al. 4 let. a CPP, la notification d'un envoi postal recommandé qui n'a pas été retiré est considérée comme effectuée le septième jour après la tentative infructueuse de notification, pour autant que la personne ait dû s'attendre à une notification. L'établissement d'un rapport de droit procédural oblige les parties à se comporter selon les règles de la bonne foi et à faire en sorte, entre autres, que les actes des autorités qui concernent la procédure puissent leur être notifiés. Cette obligation s'apprécie en fonction des circonstances concrètes et ne dure pas. Selon la jurisprudence, la personne concernée doit s'attendre à la notification d'une décision lorsqu'elle a connaissance du fait qu'elle fait l'objet d'une enquête pénale au sens de l'art. 309 CPP. C'est le cas lorsque des reproches sont faits au prévenu par la police et que l'ouverture d'une procédure préliminaire lui est notifiée. La fiction de notification de l'art. 85 al. 4 let. a CPP peut notamment s'appliquer à la communication d'une ordonnance pénale lorsque la personne concernée a été prévenue de l'ouverture d'une procédure pénale par la police à l'occasion d'un contrôle routier et que l'ordonnance pénale a été rendue relativement rapidement (consid. 2.3.2).
  • Dans les faits, la Recourante s'est vue adresser plusieurs ordonnances pénales portant sur des infractions à la loi sur les contraventions pénales du canton de Bâle-Ville ainsi que pour inobservation par le débiteur des règles de la poursuite ou de la faillite (art. 323 CP). Elle n'a jamais réceptionné, ni ouvert ces courriers. Les autorités ont donc appliqué la fiction de notification.
  • La Recourante avait bien reçu plusieurs rappels de paiements. Toutefois, aucun de ces courriers ne contenait un avertissement la prévenant qu'en cas de non-paiement une poursuite pénale risquerait d'être engagée à son encontre. En outre, aucun élément du cas d'espèce ne permettait de retenir que la Recourante devait s'attendre à recevoir une ordonnance de la part du Ministère public (consid. 2.4).
  • Pour ces raisons, le Tribunal fédéral a admis le recours et considéré qu'il n'était pas possible d'appliquer la fiction de la notification de l'art. 85 al. 4 let. a CPP au cas d'espèce.

TF 6B_657/2022 du 20 septembre 2023 | Renonciation à faire opposition à une ordonnance pénale

  • Le Tribunal fédéral a déclaré que la remise personnelle de l'ordonnance pénale avec une traduction orale dans une langue que le prévenu, Recourant, ne maîtrisait que partiellement combinée à la pression de la police pour que le Recourant, détenu et non représenté par un avocat, renonce à faire opposition lors de la remise de l'ordonnance pénale en présentant une déclaration de renonciation préimprimée était contraire au principe d'équité. Le Recourant avait ainsi été privé de la possibilité de faire usage du délai de réflexion de dix jours pour faire opposition, d'analyser tranquillement les conséquences de l'ordonnance pénale après sa notification, de faire éventuellement appel à un avocat et de renoncer librement à faire opposition à l'ordonnance pénale. Notre Haute Cour a conclu qu'une telle procédure était contraire au droit de la défense, notamment aux art. 3 CPP et 6 ch. 1 CEDH, car l'autorité de poursuite pénale, en n'abordant que le thème de la déclaration de renonciation et en présentant au prévenu une déclaration de renonciation préimprimée que celui-ci devait signer sans délai de réflexion lors de la remise en main propre de l'ordonnance pénale, exerçait une influence directe sur le prévenu en vue d'une renonciation à faire opposition et exprimait au moins inconsciemment qu'une telle renonciation était recommandable. Il n'y avait en outre aucune raison objective pour que les autorités exercent une telle influence sur la renonciation à faire opposition si, comme dans le cas présent, aucun avantage n'en résultait pour le prévenu (consid. 1.4).
  • A cela s'ajoutait le fait qu'il n'y avait pas non plus de garantie que le Recourant ait réellement compris la déclaration de renonciation qu'il signait. Seule une personne informée qui connaît la portée procédurale de la renonciation peut se priver de ce droit. Le fardeau de la preuve à cet égard incombe à l'autorité de poursuite pénale lorsqu'elle agit activement en faveur d'une renonciation à l'opposition en présentant une déclaration de renonciation préimprimée (consid. 1.5).
  • Le Tribunal fédéral a ajouté que les informations requises n'avaient pas été transmises au Recourant par écrit, mais seulement oralement. Selon l'état de la procédure, l'officier de police aurait demandé au Recourant, en anglais, s'il acceptait le jugement et s'il voulait renoncer à faire appel, ceci en ces termes : « If you agree with the judgement and don't want to take action against it, please sign here ». Le Tribunal fédéral a conclu que cette traduction de la déclaration de renonciation était défectueuse, car lacunaire (consid. 1.5).
  • Contrairement à l'instance précédente, le Tribunal fédéral a donc jugé qu'il n'était pas possible de partir du principe que le Recourant avait valablement renoncé à faire opposition, car la manière dont la police avait activement Suvré en l'espèce pour qu'il renonce à faire opposition à l'ordonnance pénale était incompatible avec le droit à un procès équitable. En outre, il n'était pas possible de savoir si le Recourant avait été suffisamment informé de la portée de la renonciation à faire opposition et s'il avait valablement renoncé à faire appel à un traducteur indépendant au sens de l'art. 68 CPP. L'ordonnance pénale du 18 août 2021 n'était donc pas entrée en force malgré l'opposition du 23 août 2021, en principe formée en temps utile (consid. 1.6).
  • Au vu de ce qui précède, le recours a été admis, la décision entreprise annulée et l'affaire renvoyée à l'instance précédente pour un nouveau jugement (consid. 2).


II. DROIT PÉNAL ÉCONOMIQUE

III. DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

IV. DROIT DE LA POURSUITE ET DE LA FAILLITE


TF 5A_34/2023 du 22 août 2023 | Estimation de biens immobiliers lors d'une procédure d'exécution forcée (art. 9 al. 2 cum art. 99 al. 2 ORFI)

  • Le recours portait sur la compétence et la procédure concernant l'estimation des biens immobiliers sur la base d'une demande au sens de l'art. 9 al. 2 cum99 al. 2 de l'Ordonnance du Tribunal fédéral sur la réalisation forcée des immeubles (ORFI ; RS 281.42) dans le cadre d'une procédure d'exécution forcée (consid. 2).
  • Le Tribunal fédéral a rappelé qu'étant donné qu'il s'agissait d'une estimation d'expert au sens de l'art. 99 al. 2 en relation avec l'art. 9 al. 2 ORFI, et donc d'une estimation de l'Office des poursuites, il ne s'agissait pas d'une expertise judiciaire au sens des art. 183 ss CPC (consid. 2.4).


V. ENTRAIDE INTERNATIONALE

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