En Principauté de Monaco comme ailleurs, la propriété de biens immobiliers disposant de terrasses ou d'un jardin est particulièrement valorisée.

Cela est à tel point vrai, que l'accès aux terrasses et jardins, que ceux-ci constituent une partie privative ou une partie commune avec ou sans droit de jouissance privative, peut attiser les convoitises, voire donner lieu à un usage exclusif prolongé, pendant une durée telle que l'occupant illicite pourrait imaginer invoquer les règles de prescription acquisitive pour revendiquer des droits de propriété sur le bien d'autrui.

En d'autres termes, ce qui pourrait avoir été un jour une simple tolérance, limitée, dans le cadre de bons rapports de voisinage, pourrait dégénérer en occupation illicite du bien d'autrui. Loin de constituer une hypothèse théorique, l'actualité judiciaire a permis de restaurer le propriétaire légitime dans ses droits, en confirmant le régime applicable à la prescription acquisitive.

Cela n'aura cependant été possible qu'avec une réaction rapide du propriétaire légitime : son action s'impose en effet afin de faire valoir ses droits sur le bien immeuble occupé, afin de mettre un terme à l'occupation illicite avant qu'elle ne donne lieu à acquisition de droits.

Il convient a minima en premier lieu de se reporter au règlement de copropriété et au titre de propriété pour déterminer la nature de la portion du bien occupé et en second lieu, la personne, Syndic, ou propriétaire de lot privatif, qui devra agir sans délais.

Apprécier la durée d'occupation et agir sans délais

La prescription acquisitive, qui permet de revendiquer la propriété d'un bien lorsqu'on s'est comporté comme son propriétaire légitime, peut être invoquée dès 10 ans d'occupation, ou 30 ans, selon que l'occupant possède ou non un titre sur le bien dont il fait usage exclusif.

Le délai décennal applicable aux cas ou l'occupant dispose d'un titre (entrant - par définition - en conflit avec le titre d'un tiers) apparaît ainsi particulièrement court.

Il doit être observé avec beaucoup de rigueur, en particulier alors que les cas de divisions informelles de biens par les propriétaires successifs, sans que les formalités requises (de modification de l'état descriptif de division, et de désignation dans les actes successifs de propriété qui rapportent bien souvent les mentions antérieures) n'aient été réalisées, ne sont pas rares en Principauté de Monaco.

Enfin, une attention particulière devra être portée à la durée d'occupation, qui pourra cumuler la possession de l'occupant à celle de la personne à qui il a succédé : ainsi, par exemple dans le cas d'un héritage, l'héritier pourra additionner la durée de sa possession à la durée durant laquelle ses ascendants auront occupé le bien pour atteindre la durée requise.

Apprécier la qualité de l'occupation pour déterminer si elle peut donner lieu à acquisition de droits

Pour donner lieu à acquisition de droits, l'usage exclusif du bien (sa possession) doit être :

  • Continue et non interrompue : sans période d'interruption ;
  • Paisible : l'appropriation du bien ne doit pas se faire par la force ou par des moyens illicites ;
  • Publique : la possession doit s'être effectuée au vu et au su de tous, par exemple par la pose de portes, clôtures ou toute autre manière de délimiter la propriété ;
  • Non équivoque : l'occupant doit se comporter et manifester clairement la volonté de se comporter comme propriétaire exclusif ;
  • A titre de propriétaire : les droits exercés doivent être rattachés à la propriété du bien – il peut s'agir de la conclusion d'un bail, de l'encaissement de loyers, de l'exécution de travaux relevant des prérogatives du propriétaire, etc.

Tous ces critères doivent être réunis cumulativement, l'absence d'un seul d'entre eux étant suffisant à dénier le bénéfice de la prescription à celui qui la réclame.

La preuve se révèle délicate à rapporter et peut se faire par témoignages du voisinage et au besoin, par la voie d'une requête aux fins de compulsoire.

Ainsi, il ne suffit heureusement pas d'occuper un bien pendant dix ou trente ans pour acquérir des droits de propriété, encore faut-il que l'occupant soit de parfaite bonne foi, se soit véritablement comporté comme propriétaire au vu et au su du voisinage, et n'ait pas occupé un bien qui ait été explicitement exclu de la consistance de la propriété qu'il détient.

Enfin, l'occupation illicite du bien d'autrui pourra donner lieu à indemnisation du propriétaire légitime pour le trouble anormal du voisinage causé, voire à la démolition des ouvrages construits sur le bien occupé, si l'usager ne parvient pas à démontrer ses droits.

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